Obligations environnementales en matière de création d’entreprise au Cameroun

Au lendemain du sommet sur la terre tenu à Rio de Janeiro au Brésil en 1992, le Cameroun en parfait accord avec la communauté internationale, a pris l’engagement d’intégrer les principes de gestion durable de l’environnement dans tous les aspects de développement. A partir de cette période, des réformes institutionnelles et législatives ont été entreprises.

Sur le plan institutionnel, un ministère de l’environnement et des forêts est créé dès 1994. Il sera éclaté en 2004 pour donner d’un côté le Ministère de la Faune et des forêts et de l’autre le Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature. La réforme sera complétée par la création d’un observatoire sur les changements climatiques.

Sur le plan législatif et normatif, de nombreuses réformes vont voir le jour. La constitution du 18 janvier 1996 consacre dans son préambule le droit pour toute personne de vivre dans un environnement sain dont la protection et la défense sont assurées par l’Etat. Ensuite, la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi cadre relative à la gestion de l’environnement est venue fixer le cadre juridique de gestion de l’environnement en République du Cameroun. Cette loi ainsi que ses textes d’application fixent en quelque sorte les obligations des personnes physiques et surtout morales en matière de gestion de l’environnement.

Dans le cadre de la présente réflexion, il sera question de s’appesantir uniquement sur les obligations des personnes morales, notamment les entreprises sociales, commerciales et industrielles, étant entendu qu’elles pourraient être considérées comme des entités susceptibles de générer beaucoup de nuisance ou de pollution au milieu naturel ou à l’environnement. Pour des besoins de clarté et de méthodologie, les obligations ou les exigences légales seront analysées selon que l’on se situe avant le démarrage du projet (1) ou pendant le fonctionnement de la structure (2).

1- Les obligations avant le démarrage du projet

Il ressort de l’article 17 de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi cadre relative à la gestion de l’environnement que « le promoteur ou le maître d’ouvrage de tout projet d’aménagement, d’ouvrage, d’équipement ou installation qui risque, en raison de sa dimension, de sa nature ou des incidences des activités qui y sont exercées sur le milieu naturel, de porter atteinte à l’environnement est tenu de réaliser, selon les prescriptions du cahier des charges, une étude d’impact permettant d’évaluer les incidences directes ou indirectes dudit projet sur l’équilibre écologique de la zone d’implantation ou de toute autre région, le cadre et la qualité de vie des populations et des incidences sur l’environnement en général (…). L’étude d’impact est à la charge du promoteur.

Sans l’affirmer de manière explicite, la loi cadre et ses textes d’application classent les projets en plusieurs catégories : les projets ou les structures de grande envergure, les structures de petite envergure et les autres structures. La première catégorie renvoie aux grandes unités commerciales ou industrielles dont la nature des activités qui y sont menées est susceptible de porter une grave atteinte à l’environnement. D’après le décret n° 2013/0171 du 14 février 2013 fixant les modalités de réalisation des études d’impact environnemental et social, les projets ou installations de cette catégorie sont assujettis à la réalisation de l’étude d’impact environnemental et social, qui peut être sommaire ou détaillée. Cette étude s’applique à l’ensemble du projet. Toutefois, en cas de réalisation échelonnée ou d’extension du projet, chaque phase peut faire l’objet d’une étude d’impact environnemental et social. En principe, la mise en œuvre d’un projet ne peut démarrer avant l’approbation de l’étude d’impact environnemental et social y relative. Lorsqu’il s’agit d’une politique, d’un plan, d’un programme ou d’un projet à composante multiple, le promoteur peut faire une évaluation environnementale stratégique, étant entendu que l’exécution de tout projet y relatif est assujettie à l’étude d’impact environnemental et social.

S’agissant des projets ou structure de petite envergure, ils doivent réaliser la notice d’impact environnemental. Elle est réalisée soit avant le démarrage du projet, établissement ou installation, soit au cours du fonctionnement de celui-ci.

S’agissant de la dernière catégorie, elles ne sont pas juridiquement astreintes à une quelconque étude mais lorsque la nature des activités est susceptible de nuire à l’environnement, le promoteur doit mettre sur pieds une politique environnementale notamment en matière de gestion des déchets produits.
La réalisation de l’étude d’impact environnemental et social ou de la notice d’impact environnemental donne droit à la délivrance par l’administration compétente du certificat de conformité environnementale ou de l’attestation de conformité environnementale selon le cas.

Il faut noter que tout projet qui fait l’objet d’une étude d’impact environnemental et social, d’une évaluation environnementale stratégique ou

d’une notice d’impact environnemental est soumis à la surveillance administrative et technique des administrations compétentes durant leur fonctionnement.

2- Les obligations pendant le fonctionnement de la structure

Les projets ou les structures de grande envergure qui n’ont pas réalisé l’étude d’impact environnemental et social ou qui existent avant l’entrée en vigueur de la législation et la réglementation en vigueur en la matière sont soumis à l’obligation de la réalisation de l’audit environnemental et social. Les frais relatifs à cet audit sont à la charge du promoteur. Tout comme dans le cadre des projets soumis à étude d’impact environnemental et social, tout promoteur d’un projet soumis à audit environnemental est tenu de produire un rapport semestriel sur la mise en œuvre du plan de gestion environnemental au ministère en charge de l’environnement. Ils sont aussi soumis à la surveillance administrative.

La réalisation de l’audit environnemental et social donne droit à la délivrance par l’administration en charge de l’environnement du certificat de conformité environnementale.

Les structures qui désirent opérer dans la gestion des déchets et la manipulation des emballages plastiques sont assujetties à l’obtention d’un permis environnemental délivré par le Ministre en charge de l’environnement. L’arrêté du 15 octobre 2012 qui réglemente ce permis en distingue 4 types :

  • Le permis environnemental pour le tri, la collecte, le transport et l’élimination finale des déchets toxiques et/ou dangereux, déchets médicaux, pharmaceutiques et déchets hospitaliers liquides ;
  • Le permis environnemental pour le tri, la collecte, le transport, le stockage, la valorisation, le recyclage, le traitement et l’élimination finale des déchets non dangereux et déchets liquides ;
  • Le permis environnemental pour la fabrication, l’importation, la commercialisation ou la distribution des emballages non biodégradables ;
  • Le permis environnemental pour la collecte, l’évacuation, le stockage, la valorisation, le recyclage, le traitement et l’élimination finale des déchets d’équipements électriques et électroniques.

Tout permis environnemental peut être suspendu ou retiré en cas de non respect de la réglementation en vigueur. Le permis environnemental est incessible. Sont également soumis à l’obtention d’un permis environnemental les importateurs des produits de la brocante. Il convient de préciser que la production, la commercialisation des emballages plastiques de moins de 61 microns reste interdite au Cameroun.

Tout mouvement de déchets est conditionné par la délivrance par les services compétents du Ministère en charge de l’environnement d’un manifeste de traçabilité des déchets.

En conclusion, disons que le cadre institutionnel et normatif de gestion de l’environnement a pris de l’épaisseur depuis la conférence de Rio en 1992. Aujourd’hui, la loi cadre et ses textes d’application fixent un certain nombre de conditions à remplir par tout porteur de projet afin que l’environnement soit protégé tant avant, pendant qu’après le fonctionnement dudit projet. Il en est ainsi de la remise en l’état du site dans le cadre de certains projets notamment les projets miniers et de travaux publics. Le non respect des obligations environnementales est susceptible de peine d’emprisonnement et d’amendes (Pour en savoir plus, nous vous recommandons notre article sanction, réglementation et législation environnementale au Cameroun).

Loin d’avoir fait le tour de la question, nous pensons que ce travail peut servir de boussole environnementale aux porteurs de projet afin que leurs activités soient respectueuses de l’environnement ; car c’est à ce prix que nous pourrons satisfaire nos besoins sans compromettre la possibilité pour les générations futures à satisfaire les leurs : c’est le développement durable.

Par SAPGOUI Basile
Juriste environnementaliste

 

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